Un
prêtre qui défend les valeurs laïques...
On va finir par
croire qu'AlterFocus a été squatté par les curés... Après la
lettre "Dites la vérité au sujet du terrorisme" qui
s'est avérée n'être que l'adaptation d'un sermon prononcé il y a
plusieurs années par un évêque américain, voici une autre page
avec une homélie...
Mais un
prêtre qui défend les valeurs laïques, cela
peut surprendre ! Encore plus quand il le fait en s'adressant à une
audience composée de rois, de reines, de princesses... et en
présence du Primat de Belgique !
C'était le 12
avril 2003,
dans la cathédrale Saints Michel-et-Gudule à Bruxelles. De
nombreuses têtes couronnées, chefs de gouvernement, et membres
du Gotha assistaient à la messe de mariage du Prince
Laurent de Belgique, fils cadet du Roi Albert II.
La messe, dite
par le primat de Belgique le Cardinal Danneels, était co-célébrée
par Guy Gilbert, surnommé le "curé des loubards",
qui avait été sollicité expressément par le prince Laurent, par
amitié et par reconnaissance pour le travail qu'il effectue aux côtés
des jeunes. Ce dernier a amusé l'assistance en entamant un éloge
du couple en néerlandais. Laurent a salué son intervention en
dressant à plusieurs reprises un pouce admiratif.
Après la communion, le
père Guy Gilbert a longuement pris la parole et s'est adressé à
l'assistance. Sa méditation fut le moment fort de la cérémonie
religieuse. L'assemblée est passé par toutes les émotions
sourire, rire et larmes. Quelques extraits :
"...Et tous
ceux et celles qui sont ici le savent, vous pouvez avoir tous les
titres du monde, tout l'argent du monde, si vous n'avez pas
l'amour, nous ne sommes rien."...
..."Que les
plus petits soient servis d'abord. C'est là, Laurent et Claire,
que vous serez vraiment prince et princesse. Vos enfants: ils
seront les étoiles de berger de vos vies. Donnez-leur les valeurs
que vous avez reçues de vos parents. Des valeurs strictement laïques,
d'abord universelles. On n'a pas besoin d'être chrétien pour
avoir des valeurs. Valeurs profondément laïques de respect, de
tolérance, d'amour de l'autre. ..."
"...On ne
rattrape jamais l'amour qu'on n'a pas donné quand ils sont si
petits dans le nid, si fragiles. Et j'en sais quelque chose, dans
mon métier d'éducateur spécialisé..."
Et c'est vrai qu'il en a
l'expérience le mec Gilbert : troisième d'une famille pauvre avec quinze enfants (sa mère a rendu le dernier soupir dans
ses bras, il y a quelques mois), Guy est ordonné prêtre en 1965 et nommé
vicaire à Blida en Algérie. Pour être proche de la
population, il apprend l’arabe comme plus tard à Paris il
parlera l’argot des loubards (il parlera même flamand lors du
mariage de Claire et Laurent...).
Un enfant de douze ans qui s’était
réfugié chez lui, incapable de parler pendant un an - ses parents
le faisaient manger dans l’assiette du chien, après le chien
- oriente une seconde fois sa vie : les gosses de la rue ont
besoin de quelqu’un, c’est à eux qu’il ira.
En 1970, de retour à
Paris, il s'installe dans le quartier de la Vilette. Il y poursuit
sa mission d'éducateur auprès de jeunes en rupture sociale. Il
accompagne et soutient ces exclus souvent toxicomanes ou récidivistes
pendant huit ans et témoigne de son expérience de «la zone» dans
plusieurs livres (éd. Stock).
En 1974, il achète une ruine et la rebâtit avec ses près de 250 jeunes en difficulté aidés par des professionnels et éducateurs; c'est maintenant devenu une superbe bâtisse provençale appelée
Bergerie de Faucon.
Lieu d’accueil et de vie dans les Alpes de Haute Provence, c'est un endroit où des
jeunes avec un passé judiciaire souvent chargé viennent passer quelque temps (souvent un an). Le but, avec l’aide d’éducateurs et d’éducatrices spécialisés, est de rassembler les morceaux épars d’un jeune qui a connu prisons et multiples centres pour lui permettre d'exprimer après quelques mois ses projets d’avenir
Ils vivent au maximum à 7, pas plus, afin de garder le caractère familial et
chaleureux dont ils ont besoin. Ils partagent entre eux tous les travaux à faire, domestiques, achats, petits élevages, jardinage, ateliers, menuiserie,
etc. Ils apprennent peu à peu à gérer leur "petit budget".
C’est en voyant leur comportement hostile vis-à-vis de l’adulte, mais particulièrement sensible aux bêtes, que Guy a inventé avec eux la zoothérapie : dès leur arrivée dans la communauté les jeunes doivent s'occuper de fournir soins, élevage, nourriture et apprivoisement à 300 bêtes réparties en 29 espèces du lama à l’autruche en passant par les sangliers, les paons, les kangourous et les daims.
Aucune formation n’est possible, au départ. En plus des activités physiques des cours de rattrapage, volontairement acceptés par eux, leur sont offerts. C'est à la fin du séjour qu'ils sont
re scolarisés ou orientés vers une formation professionnelle.
Quand le lieu de vie en Provence aura donné assez d’équilibre au jeune, c'est au tour d'une famille d'accueil d'aider le Jeune en le traitant comme l’un des siens. C'est sa famille d'accueil
qui s'occupe des études, des apprentissages, des stages correspondant au désir du Jeune, ou de la recherche de l’emploi souhaité.
Depuis 35 ans, Guy a "sélectionné" 50 familles d’accueil disséminées dans toute la France. Souvent de classe moyenne avec des enfants en bas âge (un adolescent risquerait de se laisser influencer par le nouvel arrivant), ces famille sont typiquement celles d'un couple qui s’aime, sans heurts importants et ayant des relations sociales constructives.
Grâce à sa famille le jeune trouve souvent, à 18 ans, une profession et un studio. Souvent il reste dans la région où déjà il a pu tisser des liens avec la famille d’accueil. On engage avec lui, alors, son permis de conduire.
Avec ses 12 coéquipiers répartis à Paris et dans la Bergerie, en liaison avec les familles d’accueil qu'il rencontre régulièrement, éducateur spécialisé, visiteur de prison, Guy vit avec ce peuple, et reste sur le terrain, proche d’eux, autant en Provence qu’à Paris.
Sa tâche et celle de ses éducateurs est immense mais elle n’est pas solitaire. Ils travaillent en solidarité avec de nombreux intervenants sociaux, le Ministère de la justice et les administrateurs de la DASS et de la PJ. C'est une tâche difficile. On leur confie les pires. C’est leur choix et c’est leur honneur.
mise
à jour 15 mars 2021
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