Plus de 80 écoles ont surfé jusqu'au Kosovo

lundi 13 mars 2000

RICARDO GUTIERREZ

Edition du 13 mars 2000 - © Rossel & Cie SA - LE SOIR Bruxelles



Certains ont 8 ans à peine. Les plus âgés en ont 14 ou 15. Ils passent leurs journées dans le froid, à Pristina, à vendre des cigarettes américaines de contrebande. De quoi ramener à la maison le double ou le triple du salaire kosovar moyen, qui plafonne à environ 200 marks (4.000 FB).

Que faire, ici, pour changer ça? C'est la question que s'est posée le consultant en éducation rosiérois Armand Burguet avant de lancer EducWeb, vaste projet de coopération interactive avec les écoles kosovares. Le principe est simple: mettre les nouvelles technologies de l'information et de la communication au service de la reconstruction du système éducatif du Kosovo.

Concrètement, l'expérience a pris forme en juin 1999 avec la mise en service d'un site (www.educweb.com)fédérant des ressources documentaires, plusieurs forums de discussion ouverts aux écoles francophones, une conférence interactive avec des experts, et des propositions concrètes de coopération (jumelage de classes, envoi de fournitures scolaires...).

Public-cible: les élèves de 10 à 18 ans, invités ainsi à confronter leur quotidien à celui des jeunes de leur âge au Kosovo, à soutenir ou initier des projets d'assistance, et à réfléchir aux enjeux de la construction d'une démocratie dans la foulée d'un conflit qui a exacerbé l'antagonisme entre communautés serbe et albanaise.

La phase interactive du projet vient de s'achever. Elle a permis aux participants de poser toutes les questions qu'ils souhaitaient (il y en a eu près de 400 différentes!) à des experts internationaux en prévention des conflits, en action humanitaire, en droits de l'enfant...

Bilan, à ce stade? Inespéré, s'exclame Armand Burguet. Là où j'en attendais une trentaine, plus de 80 écoles ont participé à la conférence, toutes provinces et tous réseaux confondus. A Tubize, poursuit-il, le seul ordinateur disponible dans l'établissement inscrit était tour à tour utilisé par trois classes différentes! Un succès qui en dit long sur la capacité de nos enseignants à se mobiliser autour de projets solidaires et citoyens.

Des centaines d'élèves ont compris par l'exemple que chacun, à son niveau, peut contribuer à créer ou renforcer le sentiment d'appartenance à une communauté multinationale fondée sur les valeurs démocratiques de citoyenneté, tolérance, ouverture aux cultures différentes. A cet égard, la mission est accomplie. Mieux: elle a aussi donné le signe aux jeunes Kosovars que d'autres jeunes, en Europe, comptent sur eux pour bâtir une société qui protège ses minorités, garantit la coexistence pacifique des communautés, et s'engage dans la voie de la réconciliation.

Bernard Kouchner le rappelait récemment aux étudiants kosovars, à Pristina: Vous êtes la première génération qui, sans oublier, pourra pardonner.

RICARDO GUTIERREZ

© Le Soir du lundi 13 mars 2000
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